26 février 2013

Focus sur le plus vieux club de province : les Titans de Saint-Etienne (futurs Giants)


C’est bien la découverte que je viens de faire en fouillant dans les archives du foot us français et qui pourrait clore les polémiques. Crée en mai 1984, les Titans de Saint-Etienne demandent leur affiliation à la FFFA et se voient répondre qu’ils sont le premier club de province à recevoir une réponse favorable. En fait, le premier club de province à s’être affilié était le club des Panthères Jaunes de Nantes. Mais ces derniers avaient disparus après leur seule saison 1984 en D1. Les Giants pourraient donc être aussi le 2ième plus vieux club de l’hexagone encore existant, après les Météores de Fontenay (à voir avec le Flash de la Courneuve officialisé cette même année 1984). Je m’attaque donc bien à une institution de notre sport en France en interviewant son président actuel. 


Le fameux sponsor "Magasin Kick Off" sur l'épaule


Vos papiers !

Jean-François Guichard, 52 ans. Je connais le foot US depuis 1984, année de mes débuts de joueur aux Titans. Je jouais defensive end et tight end.

Il y a 4 ans, je suis revenu au club comme préparateur physique. Les aléas de la vie font que je suis de nouveau Président du club depuis octobre 2012.

Parle-nous de la genèse ! Qui a crée le club ? Avec l’aide de qui ? Et ton rôle ?

Le club de Titans est né en mai 1984 par une petite annonce dans un journal local grâce à Alain Michalak. Une bonne quinzaine de gars s'est présentée. Je suis arrivé dans le club en septembre 1984 grâce à un flyer distribué à la foire de Saint-Etienne. Je me souviens de ma 1ère réaction lorsqu'on me l'a remis : "c'est ce sport que je veux faire !" Le vrai moteur à l'époque était la découverte de ce sport quasiment inconnu en France, cette soif de vouloir l’apprendre et le pratiquer. Il n'y avait pas de sponsor, pas de subvention et une seule équipe contre qui jouer (dans le coin) : les Samouraïs de Lyon. On était réellement des pionniers.

A la création du club, les couleurs étaient celles de la ville
 (bleu et jaune des armoiries de Saint-Etienne)

J’ai pris de responsabilités dans le club en étant notamment à l’instigation de la création d'une section flag (- de 16 ans). J'ai d’ailleurs organisé le 1er tournoi flag -de 16 ans en France en même temps que le Flash de la Courneuve. Par la suite j'ai été président pour la 1ère fois en 1989. Le fait le plus marquant a été de créer avec les Condors de St Georges de Beauce, un partenariat qui permettait de faire venir des joueurs canadiens tandis que des joueurs stéphanois partaient au Cegep de St Georges pour y suivre des études et continuer à jouer au football.

Après une mauvaise blessure à la colonne cervicale, j'ai arrêté de jouer et j'ai laissé le club en 1991 aux mains de J. Chevallard et B. Roche que j'avais enrôlé dans le club.



A ton avis, qu’est ce qui explique qu’une ville de province moyenne comme Saint-Etienne soit une des premières en France à répondre présente ? La religion c’est le soccer, là-bas !

La réponse est dans la question. C’est justement parce que c'est la religion dans la région. Tous les pionniers du club n'aimaient pas particulièrement le pousse boulette (ou football).

Une explication pour le nom de «Titans» et les couleurs  tricolores du début ?

Le nom de «Titans» était un hommage aux mineurs de fonds de la région. Les couleurs d’origine sont celles des anciennes armoiries de la ville, bleu marine et jaune. Notre maillot d’origine était bleu/chiffre jaune. On a changé de nom en 1986 pour devenir «Giants» à cause d'un sponsor important (les fameux Géants Casino). On en a profité pour changer de couleurs et devenir bleu-blanc-rouge juste dans le but de se démarquer de la couleur verte de l'ASSE (soccer).

[NDLR : Ironie du sort, les Giants finiront par adopter le vert dans les années 2000 qui symbolise mieux la ville dans l'imaginaire collectif] 

[En 1987, la FFFA et son nouveau président voit grand. Fini le petit championnat de division 1 consanguin entre clubs parisiens ! Place à un vrai championnat national à 16 clubs dont 5 de provinces. Les Titans profitent de cette restructuration et obtiennent un ticket pour la 1er division sans avoir participé à la finale D2.]

Cette année 1987 est historique pour le club puisque vous réussissez à vous qualifier pour les ¼ de finale de division 1. Vous perdez 16-00 contre les finalistes : les Jets de Paris. Une équipe qui vous avez battu deux fois en saison régulière. Bon, ce n’était pas un championnat très long et compliqué comme aujourd’hui mais ca reste quand même le niveau le plus haut jamais atteint par le club. Pas trop frustré de ce ¼ perdu ?

Sur le moment oui c'est certain ! Mais après réflexion il faut reconnaître qu’ils avaient beaucoup plus d'expérience que nous. Les clubs étaient nombreux en région parisienne et leur temps de jeu en compétition leur a été précieux. De plus, ils existaient depuis plus longtemps que nous (1983) et étaient déjà finalistes en 1985.

Titans contre les Gladiateurs de Rennes

Pour continuer à tenir la route en D1, vous aviez recruté du lourd avec 3 américains de choc : Gary Blacke, Roger Crane, Ron Sherwood. Sûrement du jamais vu dans l’histoire du club. Comment avez-vous fait ?

Le club trouve un mec extraordinaire en la personne de Ron Sherwood, ingénieur dans une entreprise américaine installée à St-Etienne. Il jouait LB dans une université américaine, il avait un très bon niveau. Il est arrivé dés 1986 et nous a réellement tout appris, grâce à lui les joueurs ont fait des progrès considérables. Ron a fait venir d'autres américains dans le club comme John Ciancolo ou John Gould. Je ne me souviens pas de Roger Crane mais Blacke était canadien si mes souvenirs sont bons.

Vous aviez la réputation d’avoir une ligne monstrueuse avec 4 joueurs de plus de +100 kg. C’est aussi l’époque de votre célèbre fullback, Olivier Luiset (qui fera plus tard les heures de gloire des Argonautes et de l’équipe de France). Malheureusement vous ne faites que vous maintenir en division 1 sans jouer les premiers rôles. Que vous a-t’il manqué ?

C'est vrai il y avait quelques lourds en ligne : Pagnan, Bruas, Crozet, etc... Il y avait Lulu, qui jouait aussi LB. Il doit beaucoup à Ron qui lui a vraiment les bases du football et de la musculation. Malgré sa taille, 1,75m, Olivier était rapide et surtout puissant.

Dans notre poule, il y avait les Argonautes qui avaient déjà de très gros moyens financiers avec des semi-pros.  Toutes les équipes ne jouaient pas vraiment dans la même catégorie. Comme dans toutes les équipes où l'effectif est assez réduit, on avait trop de lacunes sur des postes.

Championnat de D1 en 1987 contre le Flash de la Courneuve.
(Avec l'ancien maillot Bleu/Jaune des débuts).

En fin de saison 1989, le club est relégué en division 2. A l’origine de cette décision, une sanction pour forfait. Trop de blessés, je crois ?

Effectivement on cumulait pas mal de blessés Vial (QB) et surtout Luiset. Le rendement de l'équipe était forcément moindre. A l’époque nos moyens financiers étaient limités avec des déplacements aux 4 coins de France.

En D2, vous devenez l’épouvantail. Vous disputez les ¼ de finales en 1990, les ½ en 1991. En 1992, une nouvelle chance de monter dans l’elite se présente avec la restructuration des championnats. Il vous faut atteindre les ½ finales. Malheureusement vous perdez en ¼, face aux Kangourous des Pessac dans un match à marquer d’une pierre noire pour l’histoire du club. Alors que vous meniez à quelques seconde de la fin du match (et que vous étiez dans les 20 yards adverses) votre RB se fait voler la balle en tentant une course inutile et c’est le TD victorieux pour les Aquitains. Le club a laissé passer sa chance et ne reviendra jamais en division 1.

C'est vrai qu'on a été naïf sur ce match et on a eu des regrets pendant longtemps… Les Kangs sont restés notre bête noire.

[NDLR : en 2006, les Kangs priveront à nouveau les Giants d’une ½ finale de division 3 de deux petits points. Rebelote en 2011 : les Kangs battent les Giants en ½ finale de division 2 et les privent d’un match pour la montée en Elite].

Giants vs Black-Panthers de Thonon-les-Bains

Malgré l’arrivée d’un nouveau coach US, Anthony Carvalho, le club restera en division 2. Faut dire que le foot us a pris plus d’ampleur et la concurrence est plus rude. De plus vous n’aviez plus le soutien financier d’avant. 

Le Club, sans rouler sur l'or, avait quand même de bons moyens financiers à l'époque. Il y avait surtout un problème de communication avec Anthony et la mayonnaise n'a jamais pris. On ne gère pas un coach comme on gère un joueur étranger. Le choix n'était donc pas le bon.
Pourtant il y avait encore de bonnes individualités comme Cyril Durand un tight end de 1,85m pour 110 kg. Il a fait aussi les beaux jours des Condors de St Georges de Beauce et des Argonautes.

Toujours face à Thonon, cette fois en Savoie

C’est à partir de cette époque que le club tombe définitivement dans l'anonymat de la division 2, tout en ayant le statut d’être d’une équipe difficile à battre et âpre à jouer. Au fond, c’est ce statut qui colle à la peau de ce club depuis maintenant 20 ans, avec ses hauts et ses bas (passage par la division 3)

C'est une marque de fabrique du club, comme de la mentalité stéphanoise : être difficile à battre et dure physiquement. Ce dont je suis assez fier.

Après le départ de Roche et Chevallard, le club a connu une période noire effectivement. Il a failli disparaître, on peut le dire. Mais grâce à des individualités, il a survécu et a su collecter quelques titres.

C’est sous la houlette de Ludovic Bernon que le club va retrouver un second souffle. Dés l’âge de 18 ans, il commence à coacher au sein du club. Après un détour en Elite chez les Black-Panthers puis en D2, aux Falcons de Bron-Villeurbanne, il revient au club pour prendre peu à peu les reines sportives du club. Il permet au Giants de glaner 2 titres de champion de France flag et 1 titre de champion régional. En 2009, c’est la consécration avec le titre de champion de France de D3. En juin 2011, le club est de nouveau aux portes de l’Elite (1/2 finales de D2 perdues face à Pessac). Le club dispose maintenant d’une base solide avec une équipe junior et cadet.

Je reprends un club sportivement assez sain, avec de l'ambition. Malheureusement il nous manque un stade digne de ce nom. C'est une des bases primordiales que d'avoir un vrai terrain de football, pour pouvoir progresser sportivement et aussi donner envie à nos partenaires de mieux nous suivre sans parler des spectateurs présents pendant les rencontres. Je suis un sportif, j'adore l'adversité pour pouvoir me surpasser et les challenges pour conquérir.

Penses-tu que le club pourra retrouver l’Elite ? Que manque t-il ?

La réponse est oui ! Je mettrai tout en œuvre pour revenir en Elite. Je ne brûlerai pas les étapes car je sais ce que veut dire "changer de division". Passer de la 2ème à la 1ère division constitue un énorme écart, tant financier que sportif. Nous avons la volonté d'y arriver, il nous faut juste prendre les bonnes décisions et faire les bons choix. Mais je dois dire que sans vrai terrain de football cela restera extrêmement difficile.

Le titre de champion de D3 en 2009 contre une armada du Flash.
17 Giants contre le double de joueurs en face. Score 16 à 13.

Et pour l’avenir proche ?

Cette année notre ambition reste modeste car nous changeons de génération. Il y a eu beaucoup de départs en retraite et, forcément, la jeune génération doit s'aguerrir. J'ai bon espoir car nos 2 recrues américaines, FuQuan Borum (RB) et Sean Foster (QB), sont des joueurs qui répondent bien à nos valeurs de travail et d'humilité. Je pense aussi que le staff technique est en train de nous montrer de bonnes choses.
Il y a pas mal de jeunes qui font vraiment plaisir à voir jouer, dont un petit groupe qui reprend le 1er leitmotiv du club : No Pain No Gain.

5 commentaires:

  1. Merci Greg pour cet article interessant qui m'a ramene 28 ans en arriere!!! Je me souviens quand "les Michalak" m'ont appeles pour s'affilier a la federation (j'etais a cette epoque, delegue regional de la FFFA!)MERCI a JF Guichard qui a toujours ete un bon mec! :)
    Pierrick Bigot Fondateur des Samourais de Villeurbanne

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  2. Tres bel article. Merci
    Un ancien Giants et maintenant fidele spectateur.
    Stéphane

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  3. Bon ben, j'ai le fin mot de l'histoire : les Panthères Jaunes ont pris une année sabbatique aprés 1984 et ont décidé de changer de nom durant cette période.

    Donc GIANTS = N°2 des clubs de province encore en vie (sous réserve que les Drakkars soient aussi les descendants légaux des Dockers) ;-)

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  4. à nantes le club àa toujours existé et a changé de nom 4 fois.
    82 84 panthères jaunes/ 84 92 drakkars / 92 97 firebirds / et enfin dockers depuis 97 . cette année nous fètons les 30 ans du club et les 10 ans du titre de d3 .
    çà fait plaisir de voir que des clubs de province durent aussi longtemps et pourvu que çà continue.

    seb dockers.

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  5. C'est beau de revoir ces vielles photos.
    M. Madec il y a 30 ans...
    Les bons vieux cône de chantier pour marquer les end zone.
    Bravo Belette.

    Micky

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