8 septembre 2006

Emmanuel, joueur de D2, appelé en Equipe de France


Emmanuel Fort roule plein pot pour le foot us

A 25 ans, le fullback des Dockers de Nantes, surnommé «le bus» par ses coéquipiers, a été retenu pour le stage en Equipe de France du 6 au 13 août à Thonon-les-bains.

Prochain arrêt : Thonon-les-bains. Emmanuel Fort, un footballeur américain de Cognac, a été retenu pour un stage Equipe de France du 6 au 13 août, en Haute Savoie. Le stage se soldera par un match amical contre la «team USA», une sélection de joueurs américains amateurs.

«Le bus», c’est le surnom attribué à ce joueur de 25 ans par ses coéquipiers. Le même que Jérôme Bettis, le RB des Steelers de Pittsburgh, qui vient de prendre sa retraite après une victoire au Superbowl. 

Avec son mètre 80 pour 121 kilos, on comprend mieux le surnom de ce fullback, dont le gabarit ressemble beaucoup au «bus»original. Retrouvez-vous face à Emmanuel Fort lâché à pleine vitesse (il court les 40 yards en 5.06 secondes), et vous aurez effectivement l’impression d’avoir été fauché par un poids lourd. Le gaillard porte d’ailleurs très bien son nom également. Ballon en main, il a un faible pour faire tomber les plaqueurs comme une boule de bowling devant un jeu de quilles. Le reste du temps, il s’acharne à bloquer les défenseurs pour protéger et ouvrir la voie au porteur du ballon. Une tâche moins glorieuse mais à laquelle il ne rechigne pas. «Je me fiche d’avoir le ballon ou pas, pourvu que l’équipe avance». Cerise sur le gâteau, Emmanuel sait faire les long snaps.

LA FIN ET LES MOYENS

 C’est pour ces qualités athlétiques et son abnégation que l’entraîneur national Larry Legault a retenu le jeune homme de 25 ans, après une préselection en novembre dernier. Le stage réunit 68 joueurs. 45 seront retenus pour composer le groupe France qui participera au Mondial, en juillet 2007 au Japon. 

Si Emmanuel se dit «tout simplement heureux» de cette sélection, il ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. «Je sais que l’équipe de France recherche des joueurs à mon poste, et le coach m’a dit qu’il me faisait confiance» confie-t-il. 

Serein, il s'est fixé des objectifs et se donne les moyens de les accomplir. «Si je veux être le meilleur fullback de France, j’ai intérêt à me dépasser. En plus du foot, je fais 6 heures de musculation par semaine, du cardio et de l’endurance». Entre les séquences de sprint et les séries à 125 kilos au développé-couché, Emmanuel Lefort s’est façonné un véritable physique de déménageur. Sa puissance du haut du corps et ses cuisses larges comme des troncs d’arbre n’excluent pas la vitesse d’appuis nécessaire à son poste. Avoir perdu une dizaine de kilos cette saison l'a également aidé à gagner en tonicité.

Si le casqué Cognaçais entretient une vélocité surprenante pour un joueur de son poids, c’est parce qu’il galope sur les terrains de sport depuis ses 6 ans. Il a joué au rugby pendant 14 ans à Cognac, dont 7 en sélection régionale. «Mais le foot us a toujours été mon truc. Quand j’ai appris qu’il existait un club dans les parages, je me suis tout de suite lancé».

A 20 ans, il lâche le gros ballon ovale pour le petit. Il effectue ses 4 premières saisons chez les Marauders, club d’Angoulême puis de Cognac. Il commence DE. «Je voulais être middle LB. Mais c'est un poste où il faut de l'expérience et quand j'ai essayé, je ne voyais pas le jeu». Le FB de l'équipe se blesse, et le club, en quête d'un nouveau titulaire, le teste à cette position. «J'y suis allé à reculons au début, parce que je connaissais mal ce poste, qui n'était pas très populaire». Mais rapidemment, il découvre les joies du travail du fullback, plus varié qu'il ne le pensait. Il porte le cuir, bloque et parfois réceptionne des passes. «C’était pas mal, mais je n’avais pas l’impression d’aller au bout de moi-même» commente-t-il. Deux ans plus tard, un stage au Harper College de Chicago lui fait découvrir une autre façon de pratiquer le foot. «C’était quelque chose. Là-bas, le sport fait partie de la culture, c’est même un moyen de s’en sortir. L’entrainement est beaucoup plus intensif, l’attitude n’est pas la même». 



«J'AVAIS ENVIE DE ME LÂCHER»

Cette mentalité de «gagnant» lui plaît, et à son retour en France, tout s’accélère. Bruno N’Dyaye, un Marauder connu pour avoir participé aux Jeux Olympiques en tant que boxeur, sprinter et nageur, revient d’un stage en équipe de France. Il apporte une expérience du haut niveau. «Il m’a ouvert les yeux, en terme de préparation et de mental» déclare Emmanuel. «Je me suis alors fixé un objectif : atteindre mes limites. J’avais envie de me lâcher». Il effectue une belle préparation physique pendant l’été, et la saison suivante, les résultats sont là. Le bus écrabouille ses visà-vis, au point que les Maurauders basent leur système d’attaque quais-exclusivement sur ses courses et celles de Bruno N’Diaye. «Je me suis rendu compte que j’avais du jus, que je m’amusais bien». Il marque 20 touchdowns dans la saison. Pour lui, c’est désormais une certitude: le football américain est un sport qui se pratique sérieusement. «Par rapport au rugby, le foot us demande beaucoup plus de rigueur en terme de physique et de préparation de match. C’est plus tactique, moins rude mais beaucoup plus violent». D’où la nécessité de se forger un mental d’acier. «Le jour du match, c’est la loi du plus fort, il faut être impitoyable. Et autant je suis très gentil dans la vie, autant sur le terrain je peux être une vraie tête de con».

Emmanuel a la «gnak», mais les Marauders restent en 3e division. Poussé par son envie de se dépasser, il accepte de rejoindre les Dockers de Nantes, qui visent la montée. C’était la saison passée. Le niveau de jeu s’élève, mais le bus est prêt à relever le défi. Il n’hésite pas à faire deux heures de route pour aller s’entrainer, et dort à l’hôtel les week-ends de match. Le dimanche, il continue de piétiner les défenseurs. Pas assez pour que le club s’élève en D2, mais assez pour être remarqué par les Chevaliers d’Orléans, équipe de D2. Il en défendra les couleurs dès septembre, tout en filant un coup de main à son club d'origine, pour qui il prépare des cahiers de jeu et des drills.

En attendant, le Cognaçais savoure ces instants d’accomplissement sportif. Et se donne «encore 3 ans avant d’arriver à (son) meilleur niveau». Ensuite, il compte bien faire de vieux os sur les terrains. «Le foot us est un sport complexe, et une grosse expérience permet d’être performant, même lorsqu’on baisse physiquement» explique-t-il. 

En clair, le bus est encore loin du terminus.

Article Baptiste Zapirain 


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