5 avril 2009

"All or Nothing" 2009 avec les Longhorns

Une histoire de football à l’Université du Texas


C’est l’histoire d’une saison de football comme les autres à l’Université du Texas d’Austin, ou presque comme les autres, ou peut-être pas tout à fait. L’histoire d’une saison de plus dans celle longue et prestigieuse des Texas Longhorns : 115 saisons, 832 victoires, 71.8% de succès, 31 titres de conférences et 4 titres nationaux, le dernier obtenu de façon épique lors d’une confrontation devenue panthéonique face à USC en janvier 2006.

C’est l’histoire de joueurs au lourd héritage sous la houlette d’un entraineur, Mack Brown, dont les équipes successives n’ont jamais gagné moins de 9 matchs par saison depuis sa prise de fonction en 1998 (et au moins 10 lors des 9 dernières années), remporté deux titres de la Big 12, 3 victoires en bowls BCS et le titre national en 2005. Cette année-là, un joueur du nom de Vince Young sortait de dessous son casque la plus grosse performance individuelle jamais réalisée lors d’un match de ce calibre en écœurant à lui tout seul le rouleau-compresseur de USC et sa flopée de talents NFL. Cette année-là, un joueur redshirt du nom de Daniel « Colt » McCoy observait avec envie depuis la touche le prestigieux #10 des Longhorns apporter à Texas son premier titre national depuis 35 ans et la troisième bague de l’entraineur mythique Darrel K. Royal dont le Texas Memorial Stadium d’Austin porte aujourd’hui le nom. 

Nouvelle saison, nouveau QB 

L’été touche à sa fin alors que s’annonce début septembre la nouvelle saison de College Football. Les grosses chaleurs sont encore là sur Austin, la capitale du Texas, et les étudiants rentrent à peine pour la reprise des cours. Parmi eux certains ont un objectif supplémentaire, en plus d’obtenir leur diplôme universitaire en fin d’année : Chris Hall, Charlie Tanner, Adam Ulatoski, Jordan Shipley, Sergio Kindle, Lamarr Houston, Roddrick Muckelroy ou encore Colt McCoy, ces étudiants là sont quelques uns des joueurs séniors de l’équipe de football, ces étudiants là défendent les couleurs orange-brûlé d’une équipe de Texas qui rêve de consécration suprême. C’est l’histoire d’un groupe de séniors qui veut terminer sur une bonne note. La meilleure possible, celle d’un titre national. C’est l’histoire d’une mission, de la quête d’un Graal, de l’accomplissement d’une tâche commencée trois ans plus tôt, à l’été 2006.


A cette époque là, le tout jeune Colt McCoy prend ses premiers snaps en tant que potentiel successeur du désormais légendaire Vince Young, qui à la surprise générale vient d’annoncer son intention de rejoindre les rangs professionnels. Le staff technique est un peu désorienté, pris à l’improviste. Mais Colt McCoy les rassure immédiatement. Il appelle le coordinateur offensif Greg Davis et lui dit simplement : « Ne vous inquiétez pas, je serai prêt ». C’est une histoire de confiance en soi. Et d’envie. Le quarterback de la petite ville de Tuscola (700 habitants) n’est pas attendu par les observateurs, d’autant qu’il se retrouve en compétition avec les surmédiatisés Ryan Perrilloux, qui décidera finalement de signer à LSU, et Jevan Snead à qui tout le monde tend déjà les rênes de l’attaque des Longhorns. 

C’est l’histoire de David McCoy contre Goliath Snead. Pour faire taire ses détracteurs Colt McCoy travaille d’arrache-pied, deux fois plus que n’importe qui, repoussant les limites de la fatigue, exécutant chaque jeu comme si le poste de titulaire en dépendait et se perfectionnant peu à peu, snap après snap, passe après passe, jour après jour. 

C’est l’histoire d’un dur labeur, de beaucoup d’abnégation mais aussi d’une continuelle remise en question. Pourtant, jamais il ne doute d’être nommé QB n°1 pour la saison à venir. Et lorsque le perfectionniste Head Coach Mack Brown le désigne titulaire et que, quelques mois plus tard, son principal concurrent Jevan Snead entérine son transfert à Ole Miss, Colt McCoy sait que la bataille est définitivement gagnée. Celui que les spécialistes du College Football considéraient trop petit, trop frêle, trop lent, pas assez puissant et pas assez solide tient sa revanche. « J’ai des amis très proches qui m’ont dit que je ne jouerai jamais [à Texas] » avoue-t-il trois ans plus tard. 

C’est l’histoire d’une revanche personnelle, donc, mais dénuée de toute rancœur. Colt McCoy n’est pas rancunier. Il savoure modestement et en silence les fruits de son travail rigoureux et acharné et de sa victoire sur les médiatiquement surexposés Ryan Perrilloux et Jevan Snead. C’est l’histoire de l’effort et du résultat récompensés à leurs justes valeurs. C’est aussi l’histoire d’un rêve qui devient réalité. Trois ans plus tard, le joueur inconnu de la Jim Ned High School termine sa saison de junior par une victoire au Fiesta Bowl, sa 32ème en carrière, et un impressionnant record NCAA de 76.7% de passes complétées. Cette victoire en bowl contre Ohio State est la troisième en autant de participations pour Colt McCoy et le groupe qui a émergé au lendemain du titre national de 2006. C’est une histoire de continuité, d’excellence, de culte de la victoire.


Un goût de revanche

Quand arrive l’automne 2009 Texas n’a qu’une envie, qu’un objectif, qu’une obsession : effacer l’affront de la saison passée qui a envoyé Oklahoma au Big 12 Championship Game, et par là-même au BCS National Championship Game, aux dépends des Longhorns malgré leur victoire sur les Sooners à la Red River Rivalry. C’est une histoire de revanche, de vengeance. C’est aussi une histoire de suprématie, sur la Big 12 et sur le College Football. 

Pour le groupe senior, c’est l’occasion de frapper un grand coup, de marquer l’histoire d’Austin et du Texas Football. Et avec l’ensemble des Longhorns de remporter un second titre dans l’ère Mack Brown et de prouver que ce Texas là peut aussi gagner sans Vince Young. C’est une histoire de reconnaissance, une histoire d’émancipation. Et une histoire de foi, de beaucoup de foi. Celle qui porte ces joueurs du Texas, où seuls la religion et Dieu ont autant d’importance que le football. Cette foi que Colt McCoy affiche sur ses autographes par un verset de la Bible (COL 3:23 Tout ce que vous faites, faites-le de bon cœur, comme pour le Seigneur et non pour des hommes), cette foi que me confie un soir Chris Hall aux abords du Texas Memorial Stadium, cette foi qui unit dans la prière les joueurs avant chaque match.

Louisiana-Monroe offert en hors d’œuvre

C’est devant plus de 100 000 fans que Texas entame sa saison 2009 dans un Darrel K Royal Texas Memorial Stadium tout fraichement rénové. Louisiana-Monroe, offert en hors d’œuvre à des Longhorns affamés, ne résiste pas à la déferlante texane et s’incline lourdement. Texas l’emporte 59-20 dans une rencontre qui voit Colt McCoy dépasser le cap des 10000 yards à la passe en carrière. Si le jeu au sol est inconsistant le jeu aérien fait merveille entre Colt McCoy (21-29, 317 yds, 2 TD, 1 INT) et son compagnon de chambre Jordan Shipley (180 yds, 1 TD). Les deux compères se trouvent parfaitement sur le terrain dans une attaque aérienne particulièrement bien huilée. C’est une histoire d’amitié et de confiance aveugle, dans la vie tout comme sur le terrain. Le match plié depuis longtemps Texas cède 10 points aux Warhawks sur leurs deux derniers drives. Malgré la large victoire, le coordinateur défensif Will Muschamp ne décolère pas de ce relâchement intolérable des joueurs remplaçants. C’est aussi une histoire d’exigence et de perfection recherchée.

Victoire inquiétante

Cette perfection défensive sera quasiment atteinte une semaine plus tard à Laramie où les Longhorns atomisent Wyoming 41-10. L’unique TD des Cowboys est marqué sur un punt bloqué qui permet néanmoins aux locaux de faire la course en tête au tableau d’affichage pendant la majeure partie de la première mi-temps. Texas réagit néanmoins et s’offre une promenade de santé lors de la seconde. Mais le mal est fait, le malaise installé. La mise en route laborieuse des Longhorns inquiète. C’est l’histoire d’un départ en douceur, d’une montée en puissance progressive pour les uns, d’un signe flagrant de fragilité pour les autres. 


La réception de Texas Tech semble donner raison aux seconds. Malgré la victoire (34-24) l’attaque de Texas ne marque ses premiers points qu’en deuxième mi-temps sous la houlette d’un Colt McCoy très loin de son potentiel heismanesque (24-34, 205 yds, 1 TD, 2 INT). Tre Newton (88 yds, 1 TD) confirme les bonnes choses entrevues lors du match précédent tandis que le jeu au sol vient en aide à une attaque en délicatesse avec sa composante aérienne. Les rôles s’inversent par rapport au premier match. C’est une histoire de support, de soutien, de complémentarité dans l’adversité.

Avant de recevoir UTEP

Pour mettre un terme à toutes les critiques sur leur jeu, somme toute efficace mais considéré comme peu séduisant, les Longhorns abordent leur quatrième rencontre de l’année avec une application redoublée. C’est une histoire d’orgueil. Au menu de ce 26 septembre les cousins du campus d’El Paso, à la frontière mexicaine. La veille, comme à leur habitude, certains joueurs se rendent au Dell’s Children’s Hospital pour y rencontrer des enfants malades. C’est une histoire de partage et d’échange, l’histoire d’un groupe qui rend à la communauté l’amour dont la communauté l’inonde. Car c’est une histoire d’amour et de passion avant tout. Colt McCoy est le premier au rendez-vous de 12h30 à rejoindre le salon des joueurs, luxueuse retraite au cœur du bâtiment de l’Athletics Department aménagée pour le calme et le repos des joueurs et où fauteuils en cuirs confortables et écrans géants encadrent une table de billard jouxtant un coin cuisine. Un pan de mur expose les casques NFL des toutes les équipes dans lesquelles jouent des Longhorns. La liste de ces joueurs est longue comme le bras. C’est une histoire d’excellence au plus haut niveau, l’histoire d’une fabrique à champions, l’histoire de la réussite exceptionnelle d’un programme. 


Le très cosy salon des joueurs est un endroit fermé, privé, à l’écart du campus, niché au sein de l’aile sud du Texas Memorial Stadium. Au niveau inférieur les athlètes de tous sports ont accès à une immense salle de musculation aux équipements dernier cri. Les joueurs de football disposent quant à eux de leur propre salle privée à l’étage qu’ils peuvent utiliser à loisir à toute heure. On peut ainsi y croiser Chris Hall s’en allant pousser de la fonte ou Colt McCoy, serviette autour de la taille, traversant le couloir pour rejoindre les douches. Jeunes joueurs sous une pression médiatique et sportive incroyable, ils n’en restent pas moins abordables, s’arrêtant volontiers pour échanger quelques mots. C’est une histoire de simplicité et de modestie, c’est aussi l’histoire d’un cocon protecteur dans lequel tout est fait pour mettre les joueurs et le programme dans les meilleures dispositions possibles et les plonger dans l’histoire et la tradition de la machine à gagner texane. 


Partout dans les couloirs s’affichent les trophées et récompenses, les inscriptions murales prêchant la philosophie et les préceptes de jeu, jusqu’à ces cornes de vache Longhorn sous lesquelles est inscrit comme une mise en garde solennelle : « Don’t mess with Texas ». C’est une histoire de respect. Et de fierté avec ces mots qui résonnent dans le couloir qui mène du vestiaire à la pelouse, dernière harangue que reçoivent les guerriers texans avant de rentrer dans l’arène du Texas Memorial Stadium : « We Are Texas ». C’est aussi une histoire de famille. Nombreuse. Nombreuse comme ces dizaines de milliers de fans qui arborent les couleurs orange-brûlé et blanche de leur université sous le soleil de plomb de cette fin septembre quand leurs amis, leurs camarades de classe, leurs enfants foulent le terrain sous le regard bienveillant de Bevo, la mascotte bovine de l’université, pour croiser les crampons avec leurs cousins de UTEP. 

Dans son petit coin aménagé derrière la end-zone sud Bevo regarde, impassible, les casques s’entrechoquer, les épaulières se frotter, les ballons voler. Il se prête volontiers aux séances photos qui font la joie des plus jeunes supporters et des journalistes mais pense sûrement au confortable enclos qui l’héberge dans la campagne avoisinante et où des étudiants dévoués de l’association Silver Spurs le choient toute l’année durant.


UTEP anéanti !

En attendant de retrouver son oasis de quiétude et ses camarades à cornes, Bevo assiste en ce dernier samedi de septembre à l’anéantissement de UTEP par une équipe de Texas visiblement décidée à éteindre l’incendie de critiques qui ravage depuis quelques semaines les éditoriaux des medias nationaux. La reprochée lente mise en route offensive n’est déjà plus qu’un mauvais souvenir à la mi-temps alors que Texas rejoint les vestiaires avec un score confortable de 47 à 7. 

C’est une histoire de mise au point, l’histoire d’un groupe qui n’a rien à se prouver mais qui doit convaincre. Et lorsque bat la dernière seconde du match Texas a convaincu : 64-7, 7 TD offensifs, 53 yards concédés en 51 jeux adverses et un seul TD accordé, sur un retour d’interception. A trois semaines du choc contre Oklahoma et avec une semaine de repos supplémentaire avant de recevoir Colorado, Texas semble remis sur de solides rails. Mais sous la surface apparemment redevenue calme règne un mal encore indéfinissable et qui pour l’heure semble incurable : Colt McCoy, extra-terrestre en 2008 et pressenti pour remporter le Trophée Heisman, peine à trouver ses marques et à atteindre son niveau de l’année précédente. En quatre matchs, il a déjà lancé 5 interceptions, autant qu’en 9 rencontres l’année passée et son pourcentage de complétion est en baisse.

Bien sûr, n’importe qu’elle équipe de College Football se contenterait d’un Colt McCoy à 80% de ses possibilités mais Texas est Texas et avec un jeu au sol inconsistant les Longhorns ont besoin de tout le talent de leur quarterback pour se frayer un chemin à travers la Big 12 et jusqu’au titre national. C’est une histoire de perfection, encore une fois, mais qui en ce début de saison fuit le n°12 de l’attaque texane.


Buffaloes battu confortablement

La réception des Buffaloes pour le deuxième match de conférence n’effacera pas les doutes et ne ramènera pas la confiance des supporters en leur attaque et en leur QB. Bien sûr, les Longhorns l’emportent confortablement 38 à 14 mais ils ne marquent que deux TD offensifs et sont à nouveau victimes d’un départ poussif, laissant l’avantage à la pause à Colorado et ne prenant définitivement le contrôle des opérations qu’en seconde mi-temps grâce essentiellement à une défense intraitable. 

Après une éclaircie face à une vulnérable équipe de UTEP, Texas est-il retombé dans ses travers ? C’est une histoire d’un doute qui s’empare de la Texas Nation, à une semaine du clash de la Red River Rivalry. Le choc attendu entre les deux superpuissances de la Big 12 est aussi la confrontation entre deux des meilleurs quarterbacks de l’histoire des deux universités, Sam Bradford coté Oklahoma et Colt McCoy coté Texas. 

Mais après un peu plus d’un mois de compétition le duel tant attendu entre les deux prodiges a perdu un peu de son lustre. Le stratège des Sooners, blessé à l’épaule lors de son premier match de la saison, n’est pas totalement rétabli physiquement et si sa participation au match n’est pas remise en question, sa capacité à jouer à son meilleur niveau reste plus que douteuse. Pour Colt McCoy la crise de confiance est à son paroxysme. De son avis même, la constante pression à laquelle il est soumis, et se soumet lui-même, et sa quête de perfection dans la lignée de ses performances de 2008 fragilisent son jeu, l’empêchent d’être aussi performant qu’il le devrait, qu’il le pourrait. C’est l’histoire d‘un homme qui porte sur les épaules tout le poids des espoirs d’une nation et de ses propres rêves, l’histoire d’un joueur qui veut tant bien faire et ne pas décevoir, l’histoire d’un co-équipier qui sait ne pas apporter tout ce qu’il peut à son équipe et qui en souffre. 

Alors quand vient la semaine de préparation du match d’Oklahoma, Colt McCoy prend du recul pour, comme il dit, trouver un moyen de sortir du trou dans lequel il s’est lui-même enfoncé. « J’ai commencé à m’amuser, à apprécier ce que Dieu m’offrait la possibilité de faire, à prendre du plaisir à jouer avec mes coéquipiers et à nous retrouver tous ensemble.» Prendre du recul, s’enlever la pression, penser à jouer pour s’amuser avant de penser à gagner… Tant de choses si peu naturelles pour un compétiteur hors pair de son calibre… « C’est la chose la plus difficile que j’ai jamais faite dans ma vie.» 


La célèbre rivalité de la Red River

Le 17 octobre alors qu’une marée orange et rouge déferle sur le Cotton Bowl Stadium personne ne sait dans quelles dispositions physique et mentale sont les deux quarterbacks stars d’Oklahoma et de Texas. La Red River Rivalry, qui clôture traditionnellement la grande foire annuelle du Texas à Dallas, a une fois de plus attiré par milliers les fans depuis Norman et Austin. A quelques minutes du coup d’envoi la nombreuse foule converge lentement et bruyamment vers les portes du stade entre les stands d’exposition et de nourriture. 

Les chants fusent, encourageant alternativement Sooners et Longhorns alors que les supporters des deux camps rejoignent sans heurt les sections du stade qui leur sont réservées. C’est une histoire de rivalité sans borne mais drapée malgré tout de respect. Et d’amitié parfois, comme celle de ces petits groupes d’amis qui arborent en toute paix les couleurs des deux équipes ou comme celle qui lie dans la vie les deux quarterbacks aujourd’hui prêts à en découdre sur le terrain. 

A l’intérieur du stade les tribunes se sont parées d’orange d’un coté, de rouge de l’autre. Les 50 yards font office de frontière entre les supporters des deux équipes, des deux universités, des deux états. L’hymne américain qui envahit le Cotton Bowl devenu subitement silencieux est le dernier lien qui unit un court instant les deux nations. Quand retentit le coup de sifflet de l’arbitre il n’y a plus d’amitié, plus de fraternité, plus de camaraderie. La guerre vient de commencer entre les deux états rivaux, elle durera près de quatre heures et ne fera aucun prisonnier. Seuls resteront à la fin les pleurs des vaincus et les rires des vainqueurs. C’est une histoire de passion exacerbée, d’amour inconditionnel, de peur de perdre mêlée d’espoir de gagner. 

Pour les Texans l’enjeu est de taille. L’objectif du titre national passe impérativement par une victoire. Pour Oklahoma, dont les espoirs de titre se sont envolés avec la blessure de Sam Bradford, il s’agit « juste » de suprématie, de revanche après la défaite de l’an passé et surtout de la jouissance incommensurable que représenterait la ruine de la saison de Texas. Toutes les pièces sont en place pour faire de cette Red River Rivalry un autre épisode épique de la saison et un autre chapitre mémorable de la longue histoire de la rivalité.


Le grand feu d’artifice attendu à Dallas accouchera finalement d’un pétard mouillé. Touché à son épaule blessée dès le début du match Sam Bradford regarde depuis la touche les siens lutter contre une attaque texane décidément inconsistante et en ce jour guère inspirée. Colt McCoy, grippé, rend une feuille de statistiques plus que moyenne (21-39, 127 yds, 1 TD, 1 INT) et mange par quatre fois la poussière dans son propre backfield. Avec 8 interceptions et un total de 228 yards de pénalités le match est très défensif. Texas l’emporte 16 à 13, limitant Oklahoma à un total de yards négatif au sol. Comme lors de 10 des 11 dernières rencontres, le match est gagné par l’équipe qui remporte la bataille du jeu au sol. Un comble pour ces deux équipes menées par deux quarterbacks aux qualités de passeurs exceptionnelles. Mais malgré la prestation quelque peu décevante, l’essentiel est là pour Texas : une victoire qui permet aux Longhorns de prendre un contrôle quasi-définitif sur la Big 12 South. 

Et pour les supporters une victoire contre le rival de Norman n’a de toute façon pas de prix. Peu importe la manière. A l’issue de la rencontre, alors que les fans de Texas célèbrent leurs héros du jour, ceux d’Oklahoma quittent les tribunes en silence. La joie des uns, la déception des autres sont vécues de l’intérieur. Bientôt tout ce petit monde se retrouvera dans les allées de la Texas State Fair sans qu’aucun incident n’éclate entre les supporters rivaux. Les étudiants, les familles, les vieux couples d’anciens élèves profitent, toutes couleurs mêlées, des dernières heures de la foire dans une bonhommie qui ne laisse aucunement présager de l’intensité émotionnelle déployée quelques heures plutôt dans les travées du Cotton Bowl Stadium.

C’est l’histoire d’une rivalité qui connait peu d’égale dans le monde sportif et qui semble reprendre lentement son souffle après avoir embrasé le mythique stade de Dallas. Il ne faudra guère attendre qu’un jour ou deux, et le retour des fans à Austin et Norman, pour que la passion reprenne ses droits et que l’on ne parle déjà plus que du match de l’an prochain.

Pour l’heure les Longhorns rejoignent Austin avec une sixième victoire en poche en autant de rencontres. A mi-parcours ils sont plus que jamais favoris pour remporter la conférence Big 12 mais quelques écueils restent à franchir. A commencer par un délicat déplacement à Columbia pour y affronter Missouri. 

Missouri : une simple formalité 

En fait de choc entre deux prétendants au titre de conférence, la rencontre entre Longhorns et Tigers tourne à la démonstration de puissance de la part d’une équipe de Texas revigorée par sa victoire contre Oklahoma. Les hommes de Mack Brown s’imposent haut la main 41-7 marquant par Jordan Shipley sur leur premier drive pour ne plus jamais relâcher la pression. Colt McCoy, débarrassé de ses petits ennuis de santé, retrouve ses sensations passées (26-31, 269 yds, 3 TD, 1 INT) derrière une ligne offensive pour une fois performante tandis que la défense maintient la prolifique attaque de Missouri sous les 100 yards et à un petit TD. C’est l’histoire d’une équipe dont tout le potentiel semble enfin pleinement s’exprimer, l’histoire d’une traversée du désert qui semble prendre fin, l’histoire d’un groupe qui semble avoir définitivement vaincu ses démons.

Oklahoma State : la promenade de santé

Cette histoire écrit l’une de ses plus belles pages la semaine suivante à Stillwater où les Longhorns rendent visite à Oklahoma State le soir d’Halloween. Grâce à une défense encore une fois intraitable – 4 interceptions dont deux retournées pour TD – Texas transforme ce duel au sommet en promenade de santé. Sans forcer leur talent offensif les Horns l’emportent 41 à 14 et assoient un peu plus encore leur emprise sur la conférence Big 12. C’est une histoire de domination totale et sans partage. Cette même domination dont faisait montre l’équipe menée par Vince Young en 2005. Et l’on se prend à rêver du coté d’Austin que cette autre histoire peut aujourd’hui se répéter…


Dans l’esprit de beaucoup le match d’Oklahoma a marqué un tournant. Il n’est plus question de départs approximatifs, plus question de doutes, plus question de malaise. Avec un Colt McCoy à nouveau en pleine confiance et malgré un jeu au sol sans véritable leader l’attaque de Texas a enquillé en deux sorties loin de ses bases plus de 40 points face à deux sérieux concurrents au titre de conférence. C’est l’histoire d’une équipe qui tourne enfin à plein régime et qui se donne les moyens de ses grandes ambitions.

La suite en guise de confirmation

La venue de Central Florida pour le quatrième et dernier match hors conférence début novembre est un résumé condensé des deux premiers tiers de la saison : départ à nouveau champêtre (0-0 en fin de premier quart-temps, 14-3 à la pause), jeu au sol répondant présent sans être une garantie à toute épreuve (2 TD mais aucune véritable star dans le backfield), une défense avare et punitive (151 yards concédés au total et 3 petits points) et un tandem Colt McCoy (33-42, 470 yds, 2 TD, 1 INT) – Jordan Shipley (273 yds, 2 TD) indéniablement le meilleur du pays. 35-3 au final et la constatation à laquelle il faut désormais s’habituer : si Texas n’explose pas hors des starting-blocks les Longhorns gagnent néanmoins leurs matchs sans jamais être réellement inquiétés. 

La seule chaude alerte contre Oklahoma semble désormais bien loin et ni Baylor balayé 47-14 ni Kansas écrabouillé 51-20 ne seront en mesure de remettre cet état de fait en cause. Pour illustrer avec brio une saison aux allures parfois schizophréniques Texas plie son match face aux Bears avant la mi-temps : 40-0 à la pause dans une rencontre surtout destinée à imposer le jeu de course. Auteur de 2 TD la semaine précédente face à Central Florida, Cody Johnson récidive avec deux nouvelles unités et 109 yards au compteur.

Face à Kansas le jeu au sol est à nouveau anémique avec un maigre total de 136 yards. Pour son dernier match à domicile Colt McCoy s’offre 396 yards et 4 TD (32-41 yds, 396 yds, 4 TD, 0 INT) tandis que les 108 yards en réception de Jordan Shipley le propulsent en tête du classement des meilleurs receveurs de Texas sur une année. Avec ce match gagné contre les Jayhawks, Colt McCoy signe sa 43ème victoire en carrière, plus qu’aucun autre QB dans l’histoire du College Football. C’est une histoire de records, de Panthéon, de firmament. Une histoire qui en ce Senior Day offre à Texas le titre de la Big 12 South, son premier depuis…2005. Mais si la fête semble totale, les 20 points lâchés à Kansas ont de quoi inquiéter : plaquages manqués, pression sur le QB inexistante, équipes spéciales en petite forme. Pour l’intransigeant Will Muschamp, déjà échaudé par les 2 TD accordés à Baylor en quatrième quart-temps, la prestation de sa défense est un motif d’inquiétude.

Inquiétude toute confirmée lors du déplacement à College Station en clôture de la saison régulière pour le match de la Rivalry Week contre Texas A&M. Dans l’antre de Kyle Field, au cœur d’Aggieland, les Longhorns abandonnent 39 points à une équipe d’A&M bien décidée à faire chuter les voisins d’Austin. Mais les invectives des Yell Leaders des Aggies n’y suffiront pas. Menée par un Colt McCoy des grands jours (24-40, 304 yds, 4 TD, 0 INT), l’attaque de Texas passe 49 points à son adversaire de Thanksgiving pour offrir aux Horns leur 12ème et ultime victoire de la saison régulière. 

Marquise Goodwwin, déjà décisif avec l’unique TD de Texas contre Oklahoma, assure définitivement la victoire des siens sur un retour de kick-off de 95 yards pour clore la marque et repousser les Aggies à 10 points. Avec plus de 300 yards à la passe et 150 à la course, Colt McCoy devient seulement le 3ème joueur de l’histoire du College Football à réaliser cette performance sur un match. C’est encore et toujours une histoire d’excellence et de records…

Cette victoire chez le grand rival texan entrouvre à Texas les portes du National Championship Game de Pasadena. Le dernier obstacle s’appelle Nebraska, vainqueur surprise de la Big 12 North grâce à une défense de fer. Compte tenu de la récente domination de la division South sur la conférence Big 12 et les fessées administrées par Texas à Missouri et Kansas peu d’observateurs doutent que cette dernière marche avant la Californie du Sud soit autre chose qu’une formidable promenade de santé face à des Cornhuskers à l’attaque littéralement inexistante. D’autant que la défense de Texas est la meilleure du pays, malgré sa crampe passagère face à Texas A&M et que le duo Colt McCoy – Jordan Shipley paraît inarrêtable. Le triomphe des Horns est annoncé avant même que ne débute la rencontre. C’est sans compter sur Ndamukong Suh et la rugueuse défense de Nebraska… 


Face à Nebraska, pour le titre de la Big 12

Dans le tout nouveau Cowboy Stadium d’Arlington, la finale de la conférence Big 12 tourne à un pugilat défensif. Texas atteint péniblement la marque des 200 yards (202) handicapé par une piètre performance au sol (18 yards) alors que Nebraska enregistre sa plus faible production offensive en 25 ans (106 yards). Pire encore qu’un jeu de course déficient, la ligne offensive des Longhorns ne parvient pas à protéger Colt McCoy que l’agressive défense des Huskers envoie 9 fois mordre la poussière. La médiocre performance qui en découle (20-36, 184 yds, 0 TD, 3 INT) sonne le glas des chances du quarterback de Texas au Trophée Heisman. Mais l’essentiel est ailleurs. 

Rapidement menés 3-0 les Longhorns ne parviennent pas à concrétiser leurs drives offensifs et il faut attendre l’approche des deux dernières minutes du deuxième quart-temps pour voir Colt McCoy rentrer dans l’en-but adverse et permettre à Texas de mener à la pause (7-6). Au retour des vestiaires la courte avance des Longhorns augmente de 3 unités grâce à un FG de Hunter Lawrence et Texas semble en mesure de définitivement plier le match lorsque Colt McCoy trouve James Kirkendoll esseulé derrière son défenseur avec le champ totalement libre devant lui. Mais le receveur texan ne parvient pas à maitriser la balle et une fois encore l’attaque des Horns est stoppée dans son élan. Faute d’avoir pu creuser l’écart Texas voit Nebraska revenir à un point puis passer en tête (12-10) sur un quatrième FG consécutif cette fois à une interception sur Colt McCoy. Avec moins de deux minutes à jouer,Texas n’a plus le choix : marquer ou mourir, marquer ou voir son rêve brisé. 

Marquer. Toute la saison durant Mack Brown a insisté pour jouer à fond les deux dernières minutes de chaque mi-temps, même une fois le score acquis. Pour habituer son équipe à marquer sous la pression, pour habituer ses joueurs à marquer rapidement. Marquer. En ce jour, à cet instant, le travail de toute une saison doit porter ses fruits. C’est l’histoire d’un exercice maintes fois répété, maintes fois exécuté et qui prend subitement une dimension vitale. C’est l’histoire d’un labeur qui doit être récompensé, sinon à quoi bon tout le travail, toute la préparation, tous les sacrifices ? Marquer, c’est l’unique obsession des onze joueurs de Texas sur le terrain, de leurs coéquipiers sur le banc, de leur staff technique sur la touche et dans les cabines, de leurs milliers de fans dans les tribunes.

Défendre, c’est l’unique obsession de leurs adversaires, défendre pour créer la surprise, défendre pour gagner la rencontre, défendre pour remporter le titre de conférence et retrouver une gloire depuis quelques années perdues. Défendre. Marquer. C’est l’histoire d’une confrontation au sommet qui atteint le paroxysme du suspense et de la tension dramatique. L’histoire d’une équipe qui va entrer dans la lumière quand l’autre pénètrera dans l’ombre. L’histoire d’un vainqueur et d’un perdant. Et d’une centaine de secondes à jouer. Pour remporter la victoire. Pour éviter la défaite. De ses propres 40 yards, il faut plus d’une minute trente et une lourde pénalité infligée à la défense de Nebraska pour emmener Texas sur les 29 yards adverses. A portée de FG de la victoire… 


Une folle fin de match

Mais alors qu’il ne reste plus qu’à utiliser un temps-mort pour stopper l’horloge et mettre au point la tactique sur troisième tentative, une mauvaise communication avec la touche force Colt McCoy à appeler le snap avec seulement sept petites secondes à jouer. Et alors que le quarterback des Longhorns s’extirpe de sa poche en quête d’une cible les secondes s’écoulent le forçant à lancer en touche. Tandis que sa balle termine son vol derrière tous les joueurs, officiels et journalistes amassés au bord de la touche le chronomètre égrène sa dernière seconde déclenchant l’hystérie chez les joueurs de Nebraska qui se ruent fous de joie sur le terrain pour fêter l’inespérée victoire. Pour les joueurs de Texas qui avaient abandonné leurs espoirs de titre l’an passé par une défaite à l’ultime seconde à Texas Tech c’est l’histoire d’un cauchemar qui recommence et d’un rêve une nouvelle fois annihilé… A moins que… L’arbitrage vidéo met en évidence une anomalie dans la gestion de l’horloge : la balle lancée hors du jeu par Colt McCoy a heurté le sol à une seconde de la fin du temps réglementaire. Il faut donc jouer cette dernière seconde sur laquelle Texas bénéficie de sa quatrième tentative. 

Abasourdis, les joueurs de Nebraska passent de l’ivresse à la stupeur, ceux de Texas de la désolation au soulagement. C’est l’histoire d’un miracle improbable, d’une deuxième chance. Et quand Jordan Shipley glisse à Hunter Lawrence un verset de la Bible (Jérémie 17:7. Béni soit l'homme qui se confie dans l'Éternel, Et dont l'Éternel est l'espérance) juste avant le snap de cette tentative de FG décisif, c’est aussi l’histoire d’une foi divine qui habite les joueurs d’Austin et qui fait dire à cet instant que si Dieu aime le College Football, il porte probablement en ce jour un maillot orange-brûlé. 

Passé si près de la désillusion totale Texas ne laisse pas échapper cette seconde chance et si les 46 yards qui séparent Hunter Lawrence des poteaux semblent être pour les supporters autant d’années lumières, le kicker des Longhorns ne tremble pas et d’un coup de pied décidé propulse le ballon entre les barres verticales et par la même occasion son équipe à Pasadena. 

Et avec ce FG salvateur Texas retrouve la lumière un court temps éclipsée par le spectre d’une défaite tant redoutée et finalement évitée de justesse. Mais l’essentiel est acquis. 

Les Longhorns terminent la saison invaincus et gagnent leur ticket pour le National Championship Game de Pasadena pour affronter Alabama au Rose Bowl. Ce même Rose Bowl, où quatre ans auparavant Vince Young offrait à Texas le quatrième titre de son histoire. Et comme en janvier 2006, Texas ne part pas favori contre le vainqueur de la conférence SEC qui a corrigé le champion sortant Florida (32-13). 

Mais Texas a pour lui ses statistiques de 8 victoires et 0 défaites contre le Crimson Tide. Et l’avantage d’avoir l’arme absolue dans des rencontres d’un tel niveau : le meilleur quarterback. Pour Colt McCoy c’est l’heure de la consécration. Après quatre années passées à la tête des Longhorns, après avoir glané 45 victoires, après avoir fait mentir tous ses détracteurs et construit autour de lui une équipe capable d’aller au bout des ses rêves. C’est l’histoire de l’aboutissement d’une carrière, de la récompense aux efforts et aux sacrifices. C’est l’histoire de longues semaines de durs entrainements et de tous ces samedis à savourer le goût de la victoire acquise sous une pression médiatique hors norme. C’est l’histoire d’un gamin de 22 ans dont quatre années de la vie ont été scrutées, analysées, critiquées jusqu’à cette finale du 7 janvier 2010 quand tout l’espoir, toute la passion, toute la déraisonnable folie amoureuse de la nation texane reposent une dernière fois sur ses épaules.


En route pour la finale nationale

7 janvier 2010. Pasadena. Là où s’est écrite l’une des plus belles pages de l’histoire de Texas en 2006. Là où Colt McCoy et ses coéquipiers ont l’opportunité de marquer cette histoire à leur tour. 

Au pays, à Austin, depuis une semaine tout semble calme. Mais sous ces apparences tranquilles, le peuple texan est en ébullition. Les radios locales ne parlent que de cette finale, analysant, contre-analysant, anticipant, prédisant, prévoyant. Les meilleurs spécialistes nationaux du College Football sont invités sur les ondes pour donner leur avis sur les chances de Texas de l’emporter. Les journaux inondent leurs pages sportives de comparaisons entre les différentes unités des deux adversaires : attaque contre défense, jeu au sol contre jeu aérien, coaching contre coaching. Au final, et malgré toutes les démonstrations les plus élaborées, une tendance perdure : Alabama est le favori du terrain, Texas celui du cœur. 

Dehors, dans les rues d’Austin, tout est calme. Les étudiants sont encore en vacances, les plus passionnés ont pris le chemin de la Californie, terre de la dernière frontière, pays où les rêves les plus fous, plus que n’importe où ailleurs, peuvent devenir réalité. 

Il fait froid en ce début janvier à Austin, les rues sont désertes et la festive 6th Street attend son heure pour se parer d’orange-brûlé et blanc. C’est l’histoire d’une ville encore endormie, capitale d’un état où tout est plus grand qu’ailleurs et qui voudrait grandir encore un peu. Juste encore un peu. D’une toute petite marche. A l’autre bout du pays, les Longhorns s’apprêtent à affronter le Crimson Tide, joué favori par la majorité des spécialistes et tout fraîchement auréolé du premier Trophée Heisman de son histoire remporté par son running back Mark Ingram. Le joueur dont les deux tiers des yards sont gagnés après contact est l’homme à abattre pour la sévère défense des Horns. 

Coté texan l’issue de la rencontre tient dans le bras droit de Colt McCoy. Un bras qui l’a conduit au sommet, tout là haut aux portes du Panthéon du College Football, alors que parti du pied de la montagne il lui a fallu gagner un à un ses galons, à force de travail, à force de labeur, dans un univers qui ne pardonne pas les erreurs et n’accepte pas la défaite. Un bras qui a fait de lui le quarterback le plus victorieux de l’histoire du College Football. Un bras qui en cette belle soirée californienne de janvier peut le faire passer du statut de superstar à celui de légende. Entre lui et cette gloire éternelle, 60 minutes, quelques centaines de yards et quelques TD. Et onze joueurs d’Alabama décidés à le mettre hors d’état de nuire.

C’est le drame pour McCoy

Alabama a les jambes de Mark Ingram, Texas le bras de Colt McCoy. Et alors que les Longhorns déroulent leur premier drive le bras de Colt McCoy, ce bras si souvent décisif, ce bras qui devait le conduire au firmament après l’avoir conduit au ciel, le bras de Colt McCoy l’abandonne. Un sévère plaquage à l’épaule contraint le QB des Longhorns à quitter momentanément le terrain pour se faire examiner et soigner. Après quelques minutes de jeu le coup est rude pour les joueurs de Mack Brown et tous les fans réunis au Rose Bowl ou devant leurs écrans de télévision aux quatre coins du pays.

Commence alors la longue attente, la chasse aux nouvelles, les caméras qui suivent Colt McCoy jusqu’au vestiaire, les informations sur son état de santé, sur les résultats de son scanner passé dans l’urgence. C’est l’histoire d’une boule au creux du ventre, l’histoire d’une angoisse interminable. Et alors que la saga Colt McCoy bat son plein hors du terrain et que Texas perd peu à peu pied dans une rencontre que les Horns semblaient être en mesure de remporter sous la houlette de leur quarterback star, la nouvelle tant redoutée tombe, froide, implacable. Comme une chape de plomb écrasant jusqu’au silence assourdissant qui frappe soudainement la nation texane : malgré son envie et sa détermination Colt McCoy ne reviendra pas. Son bras ne répond plus, engourdi et privé de sensation et de force. Colt Mc Coy ne reprendra pas la partie, son match est terminé, sa carrière universitaire est terminée, son rêve de quatre années vient de s’éteindre dans la lumière éclatante d’un Rose Bowl qui, en ce jour de janvier, prend pour lui la couleur orange des flammes de l’enfer. 

Dans les tribunes, dans les bars d’Austin, les fans sont sous le choc, abasourdis, abattus. Malgré la qualité du groupe texan, les chances de victoire viennent de s’évaporer avec la sortie de Colt McCoy. De retour sur la touche le quarterback assiste en silence au vain sursaut de son équipe puis à sa chute, finale, définitive. Le titre s’envole vers les prairies d’Alabama faute d’avoir pu être disputé à armes égales. Texas n’aura pas réalisé son rêve et ramené un nouveau titre national de Pasadena. 

Face aux caméras, le regard hagard, le visage blême Colt McCoy essaie de comprendre ce qu’il vient de lui arriver. Dieu avait sans doute un autre plan pour lui et ce soir ne devait pas être son grand soir. Il sait qu’un jour viendra où il aura à nouveau l’occasion d’offrir un titre national à son équipe. C’est l’histoire d’une confiance en soi, d’une foi à toute épreuve. Le champion, blessé dans sa chair, blessé dans son âme, blessé dans son cœur, ne vacille pas mais toutes les larmes qui ne coulent pas de ses yeux perlent dans ceux de ses fans, ceux des spectateurs ou journalistes qui comme lui ne comprennent pas l’injustice qui prive le jeune homme de la récompense ultime de tous ses efforts passés. 

C’est l’histoire d’une déception sans limite, d’un univers qui s’effondre, d’une tristesse que rien ne semble pouvoir apaiser. C’est l’histoire de quatre longues années passées à rêver à ce match exceptionnel et d’une fraction de seconde qui aura privé Colt McCoy du droit d’en jouir. C’est l’histoire d’une injustice qui frappe le plus juste des hommes.

Mais il n’est déjà plus temps de se plaindre ou de se morfondre. Pour le groupe sénior de Texas et Colt McCoy, l’avenir est aux billets verts de la NFL. Pour les autres, une saison se termine et une autre est à préparer. C’est l’histoire d’une aventure qui recommence, d’une nouvelle mission, d’un nouveau challenge. C’est l’histoire d’étudiants-athlètes qui repartent au combat, l’histoire d’une université qui veut effacer l’échec de 2009 et rebondir vers le succès en 2010. C’est une nouvelle histoire de football à l’université du Texas. 

Article de Blaise Collin


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